Romance cruelle

Un classique du théâtre russe vu par Riazanov

Romance cruelle (Жестокий романс)
URSS / Mosfilm  1984  2h25  Couleur

Eldar Riazanov avec Larissa Gouzeeva, Alissa Freindlich, Andreï Miagkov, Nikita Mikhalkov, Alexeï Petrenko…

Vers 1880, une ville sur les bords de la Volga. La ravissante Larissa, fille d’une veuve désargentée, est très courtisée. En vain, puisqu’elle aime Paratov, un gandin couvert de femmes. Il s’amourache puis disparaît. Désespérée, elle épouse le premier venu, un employé des postes niais et mesquin. Et puis Paratov revient… Tout cela ne peut que mal finir. Mais pour qui ?

Depuis ses débuts, Riazanov voulait sortir du genre comique où il étouffait. C’est chose faite avec cette adaptation d’un classique du théâtre russe, La Fille sans dot d’Alexandre Ostrovski (1878). Une reconstitution soignée pour passions exacerbées.
 

L'Ile

La foi du charbonnier

L’Île (Остров)
Russie / Studios Pavel Lounguine 2006 1h 50 Couleur
Un film de Pavel Lounguine
Avec Piotr Mamonov, Victor Soukhoroukov, Nina Oussatova, Dimitri Dioujev, Victoria Issakova…

Dans un modeste monastère posé au bord de la mer Blanche, le moine Anatoli perturbe la communauté. Sa foi de charbonnier fait désordre. A l’origine de sa vocation, un traumatisme remontant à la guerre. Culpabilité et volonté d’expier agitent son âme. Mais de l’excentricité à la sainteté, il n’y a parfois qu’un pas. Les désespérés affluent dans l’espoir d’un miracle. Alors, imposteur ou Fol-en-Christ ?
Dixième film d’un réalisateur qui, dès ses débuts, créa la sensation à Cannes en 1990 avec Taxi Blues (Prix de la mise en scène). Depuis, il ne cesse d’explorer la Russie, ses failles et ses tourments, sans concession (Leaving Afghanistan en 2019). L’Île appartient à une veine plus intimiste que le spectaculaire La Noce (Prix d’interprétation collectif à Cannes en 2000). Ici, c’est une méditation en gris-bleu. Mamonov, le saxophoniste déjanté de Taxi Blues, joue cet Anatoli en quête de rédemption.
 

Quiet Life Тихая жизнь

Résignation ?

2024  1h39   Couleur
Alexandros Avranas
avec Chulpan Khamatova, Grigoriy Dobrygin

Interprété par Chulpan Khamatova, l’une des meilleures actrices russes actuelle, Quiet Life est un film au rasoir. Emouvant et sans concession, il montre l’exil, le déracinement, l’oppression, avec intelligence et un sens profond de la mise en scène.
Chulpan Khamatova a dû fuir en Lettonie. Dans ce film d’Alexandros Avranas, elle incarne son double fictionnel : une mère russe exilée dont l’une des enfants est touchée par le syndrome de résignation et tombe dans le coma. Un rôle pour dénoncer… et se relever.
Sans nul doute, Quiet Life est un film fort qui nous parle, aujourd’hui, de la double peine subie par des artistes russes condamnant Poutine en étant eux même condamnés à l’exil.
A voir impérativement.
 

La Prisonnière du Caucase

Le rapt de la fiancée

La prisonnière du Caucase (Кавказская пленница)
URSS / Mosfilm  1967  1h17  Couleur
Léonide Gaïdaï avec Alexandre Demianenko, Natalia Varleï, Vladimir Etouch, Youri Nikouline…

Chourik, un brave garçon, féru d’ethnologie, se rend au Caucase recueillir chants et contes folkloriques. En chemin, il rencontre Nina, la fille d’un chauffeur local. Mais son patron a des vues libidineuses sur Nina : il veut l’épouser, elle refuse. Du coup, recours à une coutume ancestrale, le rapt de la fiancée. Comptez vos abattis parce que Chourik s’en va-t-en guerre pour libérer la belle Nina.
Maître du style excentrique ébouriffant, Gaïdaï signe à sa sortie une réussite éclatante (plus de 76 millions de spectateurs), devenue depuis une comédie intemporelle. Une satisfaction posthume pour un réalisateur méprisé par la critique mais adulé du public. Sa ville natale lui a érigé une statue.
 

La Commissaire

Un film qui dérange

La Commissaire (Комиссар)
URSS / Studio Gorki  1967-1987  1h50  N&B
Alexandre Askoldov avec Nonna Mordioukopva, Rolan Bykov, Raïssa Nedachkovskaïa, Vassili Choukchine, Otar Kobéridzé… D’après une nouvelle de Vassili Grossman.

Pendant la Guerre civile, un détachement de l’Armée Rouge s’empare d’une bourgade ukrainienne abandonnée par les Blancs. Klavdia Vavilova, la commissaire politique, est enceinte. Elle n’a pas trouvé le temps d’avorter. On l’installe chez Efim Magazannik, un rétameur juif père d’une nombreuse nichée. La cohabitation ne va pas de soi. La tension est soutenue par la remarquable musique d’Alfred Schnitke.
L’esthétique du film doit beaucoup au réalisateur Alexandre Dovjenko (une des références de Tarkovski) et à l’écrivain Isaac Babel. C’est une réflexion sur le passé et un constat terrible : la Révolution n’a pas pu empêcher la Shoah. En 1967, pour le 50e anniversaire d’Octobre, le message dérange. Le Goskino fait disparaître le film et le réalisateur est interdit de cinéma. La Perestroïka les sort du placard.
 

Quand passent les cigognes

La sensation du festival de Cannes 1958

Quand passent les cigognes (Летят журавли)
URSS / Mosfilm  1957  1h37  N&B
Mikhaïl Kalatozov avec Tatiana Samoïlova, Alexeï Batalov, Vassili Merkourev, Alexandre Chvorine, Valentin Zoubkov…

Deux amoureux au petit matin dans Moscou désert. L’été s’annonce superbe. Mais ce 21 juin 1941, la guerre détruit le petit monde serein de Boris et Veronika. Boris s’engage quand le cousin Marc se planque. Après la mort de ses parents dans un bombardement, Veronika est recueillie dans la famille de Boris. L’absence de nouvelles, la cour pressante de Marc – tout concourt au désarroi de Veronika.
Ce film atypique dans la production soviétique des années 50 fait sensation à Cannes en 1958 : un réalisateur inconnu (des journalistes français), une histoire simple, l’absence de propagande, des héros ordinaires broyés par une tragédie qui les dépasse, une mise en scène fluide et virtuose, des acteurs bouleversants… Bref, un coup de tonnerre et l’unique Palme d’or du cinéma russe et soviétique à ce jour.

 

Andreï Roublev

Peindre des icônes

Andreï Roublev (Андрей Рублëв)
URSS / Mosfilm  1966  3h05 N&B et Couleur

Andreï Tarkovski avec Anatoli Solonitsyne, Ivan Lapikov, Nikolaï Grinko, Irina Raouch, Nikolaï Bourliaev, Youri Nazarov, Rolan Bykov…

En l’an de grâce 1400, la Russie est en proie à la désunion. Tout à leurs querelles égoïstes, les princes s’entretuent alors que les hordes tatares mettent le pays en coupe réglée. Partout la désolation, les pillages et les souffrances plongent le peuple dans le désespoir. Eglises ravagées et incendiées, gens désemparés. La foi vacille. Au milieu de ces désordres, le moine André Roublev se demande pourquoi peindre des icônes. Face à la barbarie humaine et au silence de Dieu, l’art a-t-il un sens ?

Ce chemin de croix, c’est la quête spirituelle de tout homme encombré de son talent à une époque de fureur et de sang. La description des doutes et des responsabilités d’un créateur envers lui-même et la société vaut pour tous les pays et tous les temps. Mais comme l’a dit Dostoïevski, la beauté sauvera le monde.
 

Salyut 7

Salyut 7 ne répond plus

Salyut 7 (Салют-7)
Russie / Rossia 1-Kinokompanya STV-Lemon Films Studio-Vita Aktiva-Globus Film-Mosfilm-Lenfilm  2017  1h51  Couleur
Klim Chipenko avec Vladimir Vdovitchenkov, Pavel Derevianko, Maria Mironova, Alexandre Samoïlenko, Vitali Khaev, Lioubov Axionova…

La station spatiale soviétique Saliout 7, inoccupée depuis six mois, ne répond plus aux signaux et semble hors de contrôle, elle risque de s’écraser sur terre. Une mauvaise publicité en ces temps de guerre froide. Il est décidé d’envoyer le vaisseau Soyouz T-13 avec deux cosmonautes expérimentés pour la réparer. Une fois arrivés sur place, ils s’attellent à la tâche. Mais tout se complique, pannes et incendie se succèdent. Le retour des deux hommes est même compromis.
Librement inspiré de l’incident réel survenu en février 1985 et du sauvetage de la station, le film ne lésine pas sur les moyens et les effets spéciaux. Décollage et suspens assurés par un réalisateur efficace. A preuve, il fait en 2019 le terrible Texto.
 

Twist again à Moscou

Panique à tous les étages

Twist again à Moscou
France / Camera One-Films A2-Gaumont International-Renn Productions  1986  1h29  Couleur
Jean-Marie Poiré avec Philippe Noiret, Christian Clavier, Martin Lamotte, Marina Vlady, Bernard Blier, Agnès Soral…

Kiev en 1984. Youri organise un concert rock clandestin pour sa belle Tatiana. Les parents d’icelle débarquent, poursuivis par le KGB car le père est un intellectuel juif dissident. La petite famille se réfugie à l’hôtel Tolstoï de Moscou. Son directeur, un combinard de première, est menacé d’inspection. Panique à tous les étages, services secrets sur les dents, Politburo en émoi… Nos héros échapperont-ils à temps aux pièges et autres traquenards ?
Une affiche de rêve pour cette délirante satire à chaud du régime soviétique. Quand le film sort, le système est encore debout. Le rythme échevelé, les personnages hauts en couleur, les péripéties rocambolesques et le jeu avec les clichés donnent une savoureuse comédie burlesque au doux parfum de nostalgie.
 

Maman, je suis à la maison

Mère et fils

Maman, Je suis à la maison (Мама, я дома)
Russie / AR Contest-Non Stop Productions  2021  1h 44  Couleur
Vladimir Bitokov avec Xenia Rappoport, Alexandre Gortchiline, Youri Borissov, Natalia Pavlenkova, Ekaterine Choumakjova…

Tonia conduit un bus à la périphérie de Naltchik, capitale de la petite république de Kabardino-Balkarie dans le Caucase russe. Son fils s’est engagé dans une société militaire privée opérant en Syrie. Tonia attend son retour imminent. Et puis la nouvelle tombe, son fils a été tué. Mais elle refuse de le croire. Elle pose des questions gênantes. Surtout quand surgit un garçon qui dit être son fils.
Un sujet brûlant d’actualité – le Moyen-Orient en flammes, les milices privées russes – et le drame éternel des mères de soldats. Avec en prime l’acteur si prometteur, Youri Borissov. Le réalisateur, né à Naltchik en 1987, y a terminé l’école de cinéma créée par Alexandre Sokourov et d’où sont sortis Kantemir Balagov (Tesnota, une vie à l’étroit) et Kira Kovalenko (Les poings desserrés). Depuis, Bitokov s’est lancé dans une carrière d’acteur.
 

Ninotchka

Garbo rit

Ninotchka
USA / MGM  1939  1h50  N&B
Enst Lubitsch avec Greta Garbo, Melvyn Douglas, Ina Claire, Bela Lugosi, Sig Ruman, Felix Bressart…

Trois représentants de l’URSS sont à Paris pour effectuer la vente des bijoux (confisqués) d’une grande-duchesse. Mais séduits par les petites femmes et la bonne chère, ils s’amollissent. On envoie une sévère commissaire politique les mettre au pas. Mais elle aussi succombe au printemps et au charme décadent d’un comte. Rappelée à Moscou, elle se morfond tandis qu’il espère la faire revenir.
Garbo rit - quelle merveille ! Ce film sait allier tous les atouts d’une comédie romantique et d’une critique politique à la fois acerbe et fine. D’une main légère, maître Lubitsch, servi par un scénario malin, sait placer des touches qui font mouche : dire en 1939 que les régimes totalitaires russe et allemand se ressemblent prouve une grande lucidité.
En 1957, le remake Silk Stockings (La Belle de Moscou) de Rouben Mamoulian, sous forme de comédie musicale, réunit Fred Astaire et la sublime Cyd Charisse. Un moment inoubliable quand elle danse sur l’air « I’ve Got The Red Blues ».

 

La Maison de la rue Trounaïa

Bécassine à Moscou

La Maison de la rue Troubnaïa (Дом на Трубной)
URSS / Mejrabpom-Russ  1928  1h 04  N&B
Boris Barnet avec Vera aretsakïa, Vladimir Foguel, Elena Tiapkina, Sergueï Komarov, Anel Soudakevitch, Ada Voïtsik, Vladimir Batalov…

Un immeuble pendant la NEP, peuplé de locataires divers et variés. Le coiffeur Golikov veut engager une femme de ménage exploitable. Justement, la paysanne Paracha débarque de sa cambrousse. C’est Bécassine à Moscou. Elle découvre la ville et l’envers du décor. Parmi les seconds rôles, le papa d’Alexeï Batalov.
On ne présente plus BB, Boris Barnet dont c’est ici le troisième film après La Jeune fille au carton à chapeau. Légèreté, inventivité et irrévérence envers les canons officiels – telle est la touche Barnet. Cette comédie drôlissime croque avec brio son époque et ses petites gens. Les contraires s’attirant, c’est un des cinéastes préférés de l’austère Jean-Luc Godard.
 

L'Etoile d'un merveilleux bonheur

Ode aux Décembristes

L’Etoile d’un merveilleux bonheur (Звезда пленнительного счастья)
URSS / Lenfilm  1975  2h 28  Couleur
Vladimir Motyl avec Irina Kouptchenko, Alexeï Batalov, Natalia Bondartchouk, Oleg Strijenov, Ewa Szykulska, Igor Kostolevski, Innokenti Smoktounovski…

En décembre 1825, Saint-Pétersbourg est le cadre d’une tentative de coup d’état par une poignée de militaires, issus de la meilleure société. Elle échoue. Les meneurs sont pendus, les autres jugés et expédiés dans les mines de Sibérie. Leurs femmes, non inquiétés, ont le choix. Rester ou les suivre et affronter les pires difficultés. Le film s’attache à trois couples aristocratiques : Troubetskoï, Volkonski et Annenkov. Ce dernier a inspiré Le Maître d’armes d’Alexandre Dumas.
Drame historico-romantique dédié aux héros décembristes, les premiers à défier le pouvoir tsariste, et surtout à leurs femmes dévouées jusqu’au sacrifice. Les fameuses Dames de Sibérie d’Henri Troyat. En fait, le réalisateur Motyl célèbre le courage intemporel des opposants. La dernière scène faillit être coupée car jugée trop « actuelle » par la censure de l’époque.

 

Des films à voir et à revoir !
 

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